I'll Never Break Your Heart [Caïn - Eden]

I’ll Never Break Your Heart... Caïn/Eden - Le 28 Mars 2050

Cela faisait quelques semaines qu’Eden avait quitté l’appartement de Caïn après avoir soigné ses blessures physique ainsi qu’une infime partie de celles qui relevaient du mental. Il avait la nette impression d’avoir apporté sa pierre à l’édifice en pleine reconstruction qu’était Caïn Adhams. Et ce n’était pas franchement déplaisant. Il se sentait utile à quelqu’un comme il ne l’avait jamais été.

Il ne savait pas du tout ce qu’il ressentait pour le blond, d’ailleurs il n’avait jamais vraiment compris ses sentiments à l’égard des autres êtres humains. Ils s’étaient vus plusieurs fois depuis cette fameuse journée où ils s’étaient donné l’un à l’autre. Cependant ils n’avaient pas vraiment les même horaires mais peu importe, Eden s’était adapté. Il avait décalé ses rendez-vous, parfois de plusieurs heures voir d’un jour entier, il avait même été jusqu’à aller un peu plus tard à la Place of Lust, la maison close qu’il fréquentait, pour manger avec lui ce qui consistait, pour lui en tout cas, un effort indescriptible.

Place of Lust…Parlons en…Caïn était de plus en plus curieux à ce sujet. Il avait l’air déterminé à découvrir le lieu où Eden s’amusait et rencontrer ses nouvelles fréquentations. Le brun s’était d’abord montré réticent à le lui révéler, après tout il faisait partit de la milice et il ne l’oubliait pas…

Enfin, il avait tout de même un certain moyen de pression… Il avait la possibilité de lui attirer des ennuis non négligeables...Il lui suffisait de faire bloquer le compte qu'il réservait à la Adham's PC Crops et à toucher un mot sur ses activités au supérieur de Caïn...Eden pouvait être...Très, très vilain...C'était tellement amusant parfois...

Pourtant plus Caïn le harcelait, plus Eden avait envie de le lui dire…

Et il avait craqué. Il avait fini par lui parler de ce lieu étrange, il lui avait expliqué ce qu’il s’y passait, ce qu’il y faisait, le plaisir bestial que cela lui procurait. Néanmoins il ne lui avait pas encore révélé son emplacement. Évidemment, maintenant qu’il lui en avait parlé, Caïn voulait absolument s’y rendre…Bien sûr…Il disait que cela constituait une nouvelle source d’investisseurs potentiels, ce qui avait beaucoup fait rire Eden. Il adorait cette façon qu’avait le blond de toujours cataloguer les gens sellons ce qu’ils auraient dû être ou pas.

Caïn avait longuement insisté, Eden avait cédé. C’est ainsi qu’ils entrèrent ensemble dans la maison close pas une nuit noire et fraiche, la lune et les étoiles légèrement voilées par les nuages. Ils pénétrèrent dans le hall peu éclairé mais tout de même accueillant. Le brun jeta un regard circulaire à la pièce, il avait l’impression de redécouvrir cet endroit même s’il s’y rendait presque toutes les nuits, parfois même en plein après-midi.

Il s’empara de la main de Caïn et le tira vers le bar où se trouvait déjà plusieurs personnes, certaines discutant accoudées au comptoire, d’autre cherchant de quoi se mettre sous la dent, au sens propre comme au figuré, et d’autre encore qui se faisaient entrainer dans les chambres par les employés de la maison. Eden s’approcha lentement du bar, regardant autour de lui d’un air appréciateur.

« Voilà tu as vu… »

Murmura-t-il en se glissant sur la pointe des pieds afin de le lui dire au creux de l’oreille dont il mordilla lentement et avec douceur le lobe. Il se tourna ensuite vers le comptoir et commanda un cocktail fortement alcoolisée en fouillant dans sa poche à la recherche d’un comprimé sur lequel il mit la main avant de l’avaler à l’aide d’une gorgée de sa boisson. Il tourna lentement les yeux vers le blond et lui sourit. La soirée commençait plutôt bien, dans peu de temps la drogue envahirait son corps entier par le biais de ses veines et il se mettrait à planer.

Cela faisait maintenant quelques semaines depuis cette fameuse matinée où Caïn avait céder à ses pulsions, rompant la promesse muette qu'il avait fait à Gabriel mais honorant celle qu'il lui avait fait réellement. En quelques instants, le monde dans lequel il vivait s'était écroulé. Tout avait été chamboulé, remanié pour laisser émerger du chaos ambiant, une sorte de relation suivie avec Eden.

Si Caïn avait du expliquer à un tiers le lien qui l'unissait à Eden, il aurait été bien embêté. S'aimaient-ils ? Profitaient-ils seulement de quelques étreintes réconfortantes ? Vivaient-ils une relation amoureuse ? Formaient-ils un couple ? Ou n'étaient-ils que de bons amis qui s'abandonnaient parfois l'un à l'autre.

Le blond n'en savait rien. Il ne savait pas ce que lui même en pensait, et encore moins ce qu'Eden pouvait bien en penser. Le brun, qu'il avait toujours connu distant, assez calculateur, et avide de liberté, c'était arrangé plusieurs fois pour qu'ils partagent un repas ou une soirée ensemble.

Dans ces moments là, ils parlaient de leurs travaux respectifs, de la bourse, des investisseurs, des bénéfices de la semaine ou encore de banalités comme la moto, l'art ou la littérature. Etrangement, l'événement -comme se plaisait à l'appeler Caïn- à l'origine de cette "relation" n'avait jamais jeté un froid entre eux.

Le lendemain, ils avaient discuté comme de coutume et jamais l'un d'eux n'avaient évoqué cette fameuse soirée. Parfois, après un apéritif ou une soirée arrosée, ils finissaient chez Caïn, s'ébattaient toute la nuit, s'endormaient dans les bras l'un de l'autre, et se séparaient au petit matin.

Peu à peu, Caïn s'habituait à ces petits moments de tendresse ou de complicité entre eux. Et il se prenait à sourire lorsqu'Eden lui laissait un texto signifiant un rendez vous. C'était affligeant, mais pourtant délicieux et il se surprenait à revivre la douceur des débuts d'une passion, comme il ne l'avait jamais vécu.

En effet, sa relation avec Gabriel avait toujours été compliqué. Compliqué à démarrer, compliqué à expliquer, compliqué à vivre et compliqué à oublier. Bref. Depuis quelques jours, Caïn qui commençait à comprendre le mode de vie d'Eden, observa que le brun s'échappait de son bureau, souvent dans la soirée, ou dans l'après-midi, et n'était pas joignable pendant quelques heures.

En l'interrogeant, il avait réussi à découvrir ce qu'il soupçonnait depuis un moment déjà, qu'Eden se rendait dans une nouvelle maison close, une qu'il ne connaissait pas. Dès lors, Caïn se focalisa sur cet objectif et chercha presque exclusivement à se renseigner sur se ce lieu et ses coordonnées.

Un nouveau bordel, investi insidieusement avec l'aide d'Eden, serait un puis sans fond d'investisseurs potentiels ! Aussi, il parvint à faire céder le brun, qui décida de l'emmener le soir même dans cette maison qui s'appelait Place of Lust.

Comme lorsqu'ils sortaient ensemble, Eden avait grimpé sur la moto de Caïn, s'accrochant à sa taille en aillant enfilé un casque acheté exprès par le blond. Caïn avait ensuite démarré et suivi les indications d'Eden pour parvenir devant un bâtiment sobre à deux étages.

Après être descendu de la moto et l'avoir garé contre le parvis, les deux hommes s'étaient rendu à l'intérieur. Au début, Caïn avait observé, détaillant Eden qui se montrait parfaitement à l'aise dans cet univers familier pour lui.

Le blond ne faisait pas franchement attention au décor. Il se focalisait exclusivement sur les clients qui se tenaient vautrés dans des pouffes ou assis sur des tabourets en bois. Il souriait intérieurement de tant de proies qu'il pourrait bientôt entrainer dans les filets retords et vicieux de la Adhams PC Corp.

Soudain, alors qu'ils s'approchaient du bar, Eden se glissa contre son dos et murmura à son oreille. Caïn voyait bien qu'il s'en voulait en un sens, de lui avoir montrer son havre, mais en même temps, il avait l'air très fière d'un fils montrant un trésor caché à son père.

Caïn ne répondit rien et se contenta de prendre place à côté d'Eden, sur les tabourets hauts du bar. Tranquillement, le brun commanda un cocktail et Caïn un Gin Tonic. Alors qu'il allait engager la conversation sur l'endroit et la multitude de clients d'apparence fortunés dont regorgeait Place of Lust, Caïn s'interrompit, fixant Eden.

Il venait de sortir de sa poche intérieure, un petit sachet contenant des pilules blanchâtres. Caïn renifla de dépit en voyant le brun absorber une petite sphère et l'avaler avec son breuvage turquoise.

"T'es vraiment obligé de faire ça, 'Den ?" grogna-t-il en avalant à son tour une gorgée de Gin To'.

Eden soupira de satisfaction lorsqu'il sentit les picotements significatifs dans ses extrémités. Il absorba une nouvelle gorgée de son breuvage étrange avant de se tourner vers le blond qui s'était adressé à lui d'un air plutôt agacé :

"T'es vraiment obligé de faire ça, 'Den ?"

Il se mit à rire. La contraction de son prénom prononcée à lui l'amusait grandement et il se garda bien d'en faire part au blond, il semblait assez désappointé comme cela.

"Obligé ? Bien sûr que non...Mais...C'est tellement plaisant...Ne fais-tu donc jamais ce dont tu as envie ? Il faut profiter se l'instant présent, nous ne sommes pas éternels...Tu devrais t'y mettre Chéri..."

Ce surnom lui avait simplement échappé et, en y réfléchissant, ce n'était pas forcement inapproprié à la situation. Pour une fois qu'il pensait ce genre de choses...En se souvenant de ses propres propos, Eden se disait que, finalement, Caïn finissait toujours pas faire ce qui lui plaisait. Au moins de temps en temps, les longues nuits qu'ils passaient dans les bras l'un de l'autre en témoignaient...Enfin...Eden l'espérait sincèrement. Il ne se voyait pas être comme un simple objet dont Caïn se servirait comme par obligation, sans en tirer le moindre plaisir. Le jeune homme détestait se sentir inutile.

Il détailla longuement le blond, observant ses traits tirés,son air renfrogné, comme s'il détestait voir Eden dans cet état là. Peut être étais-ce parce qu'il avait horreur se trouver confronté à la drogue, ce qui était le plus probable, ou peut être, la plus belle des deux versions aux yeux du brun, était que Caïn s'inquiétais pour la santé d'Eden, le mieux encore fusse qu'il s'inquiète tout simplement pour lui. Bien sûr il pensait qu'il n'avait qu'a se contenter de la première version, ce devait être ça qui expliquait l'air presque dégouté du blond.

Son attention se porta soudainement sur un prostitué qui venait de faire irruption dans le bar, englobant la salle d'un regard. Il était si beau avec ses longs cheveux bruns qui tombaient en cascade le long de ses épaules, ses magnifiques yeux azur et son corps fin, taillé comme celui d'une jeune fille. Eden manqua de tomber de son tabouret en le voyant passer près d'eux. Un court instant, il oublia tout ce qui se trouvait autour de lui, la drogue l'aidant sans doute à faire abstraction du reste pour ne voir que la démarche féline du garçon, d'observer le roulement de ses hanches et le battement de ses fesses au rythme de ses enjambées...

Il sursauta et cligna des yeux avant de diriger son regard sur Caïn, il n'avait pas été frappé d'une telle beauté depuis que le blond avait croisé son chemin et avait plongé son regard sombre dans celui masqué pas les verres de contact rouges d'Eden. Il regarda à nouveau le prostitué et soupira. Il n'allait sans doute pas pouvoir s'amuser comme il l'entendait ce soir...

Une douce euphorie s'empara, lentement mais surement, de lui, signe que son cerveau commençait à être assaillit par la substance qu'il avait avaler. Il aurait bien proposer une de ses pilules magiques, qui s'avéraient être de l'Ecstasy, à Caïn pour que ce dernier se détende enfin mais il savait pertinemment que cela relevait du suicide. Aussi ne fit il rien qu'il aurait pu et surement regretté.

Il termina son verre et en commanda un autre, s'appuyant nonchalamment sur le bar, laissant lentement courir ses doigts le long du comptoir jusqu'à ce que ses derniers rencontrent la main de Caïn. Il la frôla quelques instants, écrivant des mots invisibles sur sa peau, se délectant de sa douceur, puis il releva lentement la tête.

"Alors ? Que vas-tu faire maintenant que tu as découvert cet endroit ?"

Lança t-il avec un vague intérêt. Ce qu'il voulait surtout savoir, et ce à cause de sa jalousie d'enfant roi, s'il allait passer à la place de second. Il ne voulait en aucun cas que Caïn s'intéresse à d'autres plutôt qu'à lui.

Caïn avait juste grogner alors qu'Eden lui ressortait ses beaux discours sur l'importance fondamentale pour lui de céder à ses moindres envies. Le brun n'était pas stupide, il devait bien avoir saisi que depuis la mort de Gabriel, Caïn suivait exactement cette ligne de conduite.

Encore fallait-il qu'il ait envie d'avaler une de ses immondices pharmacologiques qui détraquaient le cerveau et le rendaient esclave d'un monde idyllique ... Caïn haïssait la drogue. Il l'abhorrait depuis que son frère Abel avait commencé à fumer quelques joints au lycée, avant de le surprendre à sniffer un rail de poudre blanchâtre dans sa chambre au sous-sol, quelques semaines avant qu'il ne disparaisse ...

Et puis il n'y avait pas que ça. Caïn avait l'impression de ne plus être auprès de la même personne lorsqu'Eden s'enfilait ses pilules maudites. Le jeune homme qui lui plaisait, qui l'avait séduit dans sa vulnérabilité n'avait rien à voir avec ce bellâtre conquérant qui reluquait le cul d'une pute qui passa par là.

"Si un jour j'ai envie de ressembler à une loque pathétique, alors peut être que je m'y mettrais aussi" grogna-t-il en terminant son Gin Tonic d'une seule gorgée.

Il tapa deux coups sur le bar pour se faire servir un deuxième verre alors qu'Eden glissait insidieusement sa main sur la sienne pour y tracer de volubiles arabesques. Le brun changea négligemment de sujet, déjà probablement défoncé, en lui demandant ce qu'il comptait faire maintenant qu’il avait pénétré dans Place of Lust.

Brusquement Caïn retira sa main et lança un regard empreint de dégout à Eden qui gloussait. Il répondit de son ton tranchant avant de lancer une liasse de billet au barman.

"Je suis pas sur que ça te regarde. Amuse toi bien !"

Brutalement, Caïn se leva, renfila son manteau d'un mouvement de ses robustes épaules et se tourna vers la porte ...

Cette phrase le ramena brutalement à la réalité. En fait elle avait eu le don de l’énerver prodigieusement, il sentait la colère monter en lui et le sang pulsant dans les artères de sa tempe. Il frappa le comptoir du poing. Et se tourna vers Caïn qui semblait sur le point de partir.

« Tu bouges pas. »

Lança-t-il d’un ton sec qui ne laissait aucune possibilité de réponse.

« J’ai accepté de t’emmener dans mon monde pour que te rendre service, ça m’a couté beaucoup. Maintenant ce que tu penses de moi je m’en fiche, je ne vais pas m’arrêter de vivre parce que tu es là. Si ça ne te plait pas, casse-toi. Mais dans ce cas je ne veux plus jamais entendre parler de toi. »

Il se retourna vers le bar et commanda un autre verre, indiffèrent aux regards des gens qui avait stoppé net leurs conversations pour l’écouter. En même temps il n’en avait jamais rien eu à faire des gens, et ce n’était certainement pas maintenant qu’il était hors de lui qu’il allait s’y intéresser. Il n’y avait vraiment aucune raison. Il se contentait de fixer un point invisible sur le comptoir, ses doigts frappant frénétiquement sur la surface lisse et brillante.

Il vida son verre et en commanda un autre à la suite. Oh bien sûr il savait que la drogue et l’alcool ne faisaient pas bon ménage mais en cet instant il s’en foutait royalement. Et il ne le cachait nullement.

Il ne voyait pas pourquoi il se mettait dans des états pareils, sans doute la drogue avait décuplé ses émotions…Ou alors ce qu’avait dit Caïn l’avait vraiment blessé…Pas tant dans la signification de ses paroles, bien qu’Eden ne pensait pas que le blond voulait lui cacher quelque chose, mais dans le ton qu’il avait employé était si tranchant, si glacé. Il avait l’impression de s’être fait transpercé par le regard de celui qu’il pensait être son amant.

Et s’il avait tort ?

Caïn fut piqué au vif par la tirade d'Eden et alors que le jeune homme commandait un nouveau cocktail turquoise à l'odeur étrange. Son sang ne fit qu'un tour et il attrapa brusquement l'avant-bras du brun pour le faire tourner sur son tabouret.

Il captura son poignet entre ses longs doigts et attrapa son menton entre le pouce et l'index de son autre main. Il força les prunelles faussement rougeoyantes à fixer les obsidiennes flamboyantes qui tremblaient de rage dans leurs orbites.

"Espèce de misérable petit rat ! Tu veux jouer au grand, à l'adulte responsable, PDG de l'entreprise de feu ton papounet mais tu n'es qu'un vers de terre sans la moindre maturité. Tu n'as jamais rien fait de ta pathétique vie et la seule chose que tu commandes dans ton existence superficielle, c'est la dose de came dont tu te bourres pour planer dans un monde où tu serais quelqu'un d'un peu moins inutile. Tu ne sais rien de la vie, tu ne sais rien de la souffrance, tu ne connais rien à rien et tu oses me juger ! Tu crois que c'était plaisant pour moi, de voir la personne que j'aimais le plus au monde se repaitre dans la fange de la drogue et gâcher sa vie pour se transformer en loque ? Tu crois que c'était intelligent, mature et responsable de sa part de céder à ces petits caprices pour paraitre invincible ? Et bah si c'est ce que tu penses, c'est que tu es le plus minable des abrutis qu'il m'a été donné de rencontrer."

Caïn fit volt face, lâchant le bras Eden qui pendait mollement contre son torse. Il n'avait pas crier, non, il avait chuchoter, articulant chaque mots, chaque syllabes pour les faire pénétrer dans son cerveau, incrustant son venin au fer rouge dans son cortex.

Il ne jeta qu'un dernier regard de dégout au brun qui semblait désemparé avant de passer la porte et de sortir dans la rue. Immédiatement, il remarqua sa moto. Alors qu'il venait à son bord, prêt à l'enfourcher pour partir loin d'ici, il s'arrêta.

Quelque chose en lui venait de se briser. Si sur le coup, il n'avait penser à rien, crachant son poison avec rage, il recevait à présent le contre coup de sa réplique. Il s'était montré odieux, était sorti de ses gonds et avait céder à sa haine.

Invariablement, il trahissait chaque promesse faite à Gabriel. D'abord, il se montrait faible et se laissait envouter par la moue irrésistible d'Eden et sa vulnérabilité fragile. Puis il laissait la haine l'envahir et le submerger sans chercher à la contrôler. Comme toujours, il était victime de ses émotions, esclave de cette force en lui qui l'obligeait à céder à chacune de ses pulsions.

Et malgré tout, à présent, il s'en voulait terriblement d'avoir dit tout ce qu'il avait dit à Eden. Le jeune ne méritait pas ça. Il avait juste eu le malheur de prendre un Ecsta" et il n'en n'avait pas fallu plus pour que Caïn disjoncte. Il y avait en lui quelque chose qui le dégoutait à cet instant.

Aussi, il délaissa sa bécane pour se diriger vers la porte. A peine avait-il pousser le battant pour s'introduire dans l'antichambre du bar, qu'il vit une silhouette se mouvoir dans l'ombre. Il distingua bien vite le corps élancé d'Eden qui se tenait près de la porte.

Spontanément, sans réfléchir, il se rua à ses côtés et plaqua son torse massif contre lui, l'acculant contre un pan de mur sombre. Il s'abandonna une seconde à son regard injecté de sang et glissa une paume conquérante dans sa nuque.

Caïn ne fit pas attention aux tremblements de ses bras ou à la douleur dans ses prunelles et il colla furieusement sa bouche contre celle du brun, capturant sa lèvre entre ses dents. Il n'y avait pas de douceur dans ce baiser, pas de tendresse. Juste une rage à peine contenue par sa culpabilité.

Il ravit sa langue avec fougue, la suçotant, la mordant jusqu'à faire perler une goutte de nectar amer. Leurs dents s'entrechoquèrent et Caïn sentit son entre-jambe gonflée contre celle d'Eden. Il était abject, il était méchant, il était sans coeur, mais à ce moment là, il adorait ça.

Après quelques secondes, le souffle erratique et la respiration haletante, Caïn s'éloigna un peu, rompant la dusion de leurs lèvres pour poser son front contre celui d'Eden. Dans un murmure, presque imperceptible, il souffla :

"Pardonne moi, 'Den"
Il s’était retourné vers le bar lorsqu’il sentit une violente douleur dans le bras et arraché de sa position pour se retrouver face à Caïn qui plongeait à nouveau son regard dégoutté dans celui d’Eden

Il s’était retourné vers le bar lorsqu’il sentit une violente douleur dans le bras et arraché de sa position pour se retrouver face à Caïn qui plongeait à nouveau son regard dégoutté dans celui d’Eden

"Espèce de misérable petit rat ! Tu veux jouer au grand, à l'adulte responsable, PDG de l'entreprise de feu ton papounet mais tu n'es qu'un vers de terre sans la moindre maturité. Tu n'as jamais rien fait de ta pathétique vie et la seule chose que tu commandes dans ton existence superficielle, c'est la dose de came dont tu te bourres pour planer dans un monde où tu serais quelqu'un d'un peu moins inutile. Tu ne sais rien de la vie, tu ne sais rien de la souffrance, tu ne connais rien à rien et tu oses me juger ! Tu crois que c'était plaisant pour moi, de voir la personne que j'aimais le plus au monde se repaitre dans la fange de la drogue et gâcher sa vie pour se transformer en loque ? Tu crois que c'était intelligent, mature et responsable de sa part de céder à ces petits caprices pour paraitre invincible ? Et bah si c'est ce que tu penses, c'est que tu es le plus minable des abrutis qu'il m'a été donné de rencontrer."

Il n’avait pas tout compris sur le moment mais il s’était pris une gifle tellement monumentale que ses larmes avaient dévalé ses joues avant même qu’il ne se soit donné la peine de comprendre ce que le blond lui avait dit. Il assimilait lentement les paroles acérées qu’il ne méritait surement pas alors que Caïn quittait la pièce aussi rapidement qu’il était venu.

Il se leva lentement, sentant ses jambes prêtes à céder sous son poids tant elles tremblaient. Il vida son verre, en bu un autre puis un suivant avant de payer sa note et de rejoindre le couloir en titubant légèrement, plus alourdit par le choc que par l’alcool. Toutes ses pulsions l’avaient quitté comme si elles lui en voulaient, il n’avait plus envie de rien sinon que de disparaitre à quelque million de mètres sous terre.

Il s’approchait de la porte d’entrée lorsque celle-ci s’ouvrit, laissant place à Caïn dont l’expression avait changé. Il s’agissait toujours de rage, oui, mais elle semblait plus tournée vers lui-même à présent. Il se jeta sur Eden dès qu’il l’aperçût et le serra dans ses bras. Il plaqua violement ses lèvres contre les siennes, échangeant avec lui un baiser sans aucune douceur. Le brun se sentait encore plus mal à présent qu’il ne l’était après la tirade du blond.

"Pardonne moi, 'Den"

Murmura-t-il après avoir enfin rompu le baiser. Eden le regarde longuement, le visage baigné de larmes. Il murmura d’une voix éraillé, cassé, tremblante, incapable de parler plus fort de toute manière :

« Que je te pardonne… ? Mais qu’est-ce que ça peut te faire qu’un rat t’accorde son pardon ? Pourquoi t’intéresses-tu à quelqu’un d’aussi insignifiant que moi ? Tu crois que je ne sais pas qui je suis ? Tu crois que j’ignore qu’à cause de mon éducation et du fait que je sois un minable de base je suis devenu une loque aujourd’hui ? Tu crois que je ne suis pas au courant que je n’ai jamais eu à me battre ? Tu crois que je pense que ça m’a rendu service ? Non. Je sais tout ça. Jusqu’à présent tout le monde s’en est foutu. Toi non, toi tu me jette tout en pleine figure, te fichant du mal que ce que tu peux faire. Alors non je ne te pardonne pas, je n’ai qu’à te dire merci. »

Sa voix se brisa à la fin de sa tirade si bien que le mot « merci » fut à peine audible. Il le repoussa et s’éloigna de ses bras. Il essuya lentement ses yeux et se tourna vers lui.

« Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? »

La question semblait simple mais cachait un sens bien plus profond, Eden s’attendait à ce que Caïn disparaisse encore, qu’il l’abandonne comme l’avait fait tous les autres. Il ne demandait pas ce qu’ils allaient faire maintenant, mais pour eux, à long terme. Et si Caïn ne le comprenais pas il n’essayerais pas à nouveau, il n’en avait plus la force.

Alors que Caïn abandonnait l'une des plus féroces de ses carapaces pour s'excuser auprès d'Eden, le brun le remerciait. C'était étrange et un peu inopportun. Caïn aurait juré que lorsqu'une personne passait outre sa fierté pour présenter des excuses, la réaction de son vis-à-vis ne devait certainement pas ressembler à celle d'Eden.

Au lieu de lui en vouloir encore en lui envoyant sèchement ses quatre vérités à la figure, le brun lui expliqua dans une longue tirade, combien il avait raison, et combien il était le seul à avoir jamais oser lui dire en face.

Il y avait dans le regard d'Eden, une reconnaissance et une tendresse blessée qui aurait fait fondre n'importe quel morceau de glace. Et même si Caïn avait quelques parts au fond de lui, l'envie de le repousser par crainte, il en était incapable.

Dans un murmure, leur front se touchant toujours, il demanda avec cette vulnérabilité candide qu'il l'avait fait succomber quelques semaines auparavant :

« Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? »

Etrangement, Caïn ne put retenir un sourire franc et sincère qui illumina son visage. Dans un coin de son coeur, la voix cristalline de Gabriel résonnait, lui soufflant d'être heureux. Serein, il glissa une main au creux des reins d'Eden et l'autre tout contre sa joue.

"Maintenant, tu restes avec moi. Je ne te lâcherais plus !"

Et avec toute la douceur et la tendresse qui palpitait au fond de son torse, Caïn se rapprocha, lentement, plaquant sa poitrine contre celle tremblante d'Eden. Il posa ses paumes contre ses omoplates et pressa un peu pour le tenir au creux de ses bras.

Tranquillement, il régla sa respiration sur la sienne et ferma les paupières. Le blond enfoui son nez dans contre la gorge d'Eden pour savourer l'odeur fruitée de ses cheveux. Il y avait tant de fragilité dans son maintien qu'il avait peur de le briser par son étreinte.

Et pourtant, malgré les soubresauts du corps frêle entre ses bras, Caïn se sentait définitivement à sa place.

Eden sentit Caïn se détendre contre lui. Tant mieux, il présentait qu’il ne pourrait pas supporter une nouvelle crise de rage. Il avait déjà eu du mal à surmonter celle qui venait de passer…Il ne comprenait d’ailleurs toujours pas pourquoi elle avait eu lieu, en fait ça n’avait plus vraiment d’importance maintenant, c’était terminé pour de bon. Enfin il esperait du moins ne pas avoir à revenir dessus, une fois avait largement suffit…Il en était persuadé.

"Maintenant, tu restes avec moi. Je ne te lâcherais plus !"

Tout le poids qui pesait sur les épaules du brun s’était envolé. Il lui venait plusieurs mots en tête sans qu’il n’en ai jamais vraiment compris le sens, des mots comme « amour ». Amour ? Il était donc amoureux du blond ? Ou bien peut être ce laissait il tout simplement embobiner par ses belles paroles…Caïn allait il lui faire croire de belles choses pour le laisser sombrer ensuite ?

Il devait absolument en avoir le cœur net aussi une phrase quitta ses lèvres si sournoisement et rapidement qu’il ne put la retenir.

« Caïn, tu m’aime ? »

Il plongea son regard dans celui du blond, se serrant contre lui. Oh il aurait tant aimé que sa réponse soit positive. Si ce n’était pas le cas et bien…Et bien il ne savait pas ce qu’il deviendrai. Oh bien sûr il trouvait stupide de mourir à cause d’un chagrin d’amour mais dans son état il serai capable de se suicider car la boulangerie est fermée.

Il recule doucement, prêt à subir la réponse qui serait forcément négative et sonnerait comme un coup de poing sous une cascade d’eau glacée. Il baissa lentement la tête et soupira longuement. Il n’aurait jamais dû demander ça mais son subconscient voulait tellement connaitre la réponse. Enfin il serait fixé.

Soudainement, lorsque la voix sournoise d'Eden s'insinua dans ses tympans, Caïn sursauta et se recula, comme un réflexe archaïque qui sortait de ses tripes.

"Caïn, tu m'aimes ?"

Dans la bouche d'Eden, ces mots sonnaient comme le glas des quelques jours pendant lesquels, il avait profité de sa présence, de lui et de ce qu'il lui apportait sans se poser de questions. Une fois dépassé, ou plutôt refoulé pour quelques heures, sa honte de trahir Gabriel, il parvenait à s'abandonner dans ses bras sans se torturer.

Mais à présent, c'était fini. Quelque soit sa réponse, les choses allaient changer pour eux. Le relation allait devenir officielle ou se terminer avant même d'avoir réellement commencé. Ce qui n'avait aucune conséquences, en aurait ou alors il dirait sans doute adieux à Eden pour toujours.

Ce n'était pas une question facile. Quand bien connaitrait-il une réponse, il hésiterait tout de même à lui répondre. Aussi, Caïn prit quelques secondes pour réfléchir. Une réflexion profonde et intense qui dut être trahi par la ride fine mais marqué qui coupait son front.

Finalement, il arriva à la conclusion qu'il était coincé, prit au pièce. La réponse venait d'elle même, même s'il n'était pas sur que ce soit la vérité. Mais il ne se voyait pas dire autre chose, autant pour ne pas blesser Eden, que pour avoir le droit de rester encore près de lui.

Aussi, Caïn s'approcha du brun et effleura à nouveau sa joue pour plonger un instant son regard dans le sien, cherchant à capter son âme à travers ses prunelles. Ses pupilles dilatées tremblaient et ses dents claquaient un peu. Silencieusement, il l'implorait de lui répondre pour mettre fin à son supplice.

"Même si je connaissais la signification réelle de ce qu'était l'amour, et que j'avais une certitude quelconque sur mes propres sentiments à ton égard, je ne pourrais répondre autre chose que "oui", je présume."

"Même si je connaissais la signification réelle de ce qu'était l'amour, et que j'avais une certitude quelconque sur mes propres sentiments à ton égard, je ne pourrais répondre autre chose que "oui", je présume."

Eden le regardait fixement. Beaucoup de choses se bousculaient dans sa tête et…Oh mon Dieu il avait dit oui ! OUI ! Il laissa échapper un doux rire. Oh non la situation n’avait rien d’amusant mais l’instant était tellement beau que le brun débordait de joie…Il était aussi, accessoirement, encore drogué ce qui n’arrangeait pas son hilarité…

Lorsqu’il se calma enfin, il s’avança vers Caïn qui avait reculé et se hissa sur la pointe des pieds afin d’échanger avec lui le plus doux et tendre des baisers qu’il n’avait jamais donné à qui que ce soit, il passa les bras autour de sa nuque et garda longuement ses lèvres contre celle, douce et chaudes, du blond. Il aurait eu envie de rester collé à lui, de ne plus jamais le lâcher, mais il savait que Caïn, comme lui quelque minute auparavant, avait besoin de savoir.

Aussi recula-t-il de quelque pas, laissant glisser ses mains le long des bras du blond afin de prendre les siennes, entrelaçant leurs doigts. Il leva lentement les yeux pour plonger dans son regard d’ébène qui reflétait tant de chose en cet instant.

« Tu sais…Toute ma vie je n’ai aimé et adulé que moi-même…Je ne voyais pas plus loin que le bout de mon nez…Mais c’est diffèrent aujourd’hui, tu es apparu dans mon champ de vision et tout s’éclaire à présent…C’est toi…J’ignore aussi si c’est de l’amour pur, j’ignore le sens de ce mot autant que toi, mais si c’est ça alors je suis le plus comblé de tous en cet instant grâce à toi… »

Il reprit son souffle et baissa les yeux. Jamais au grand jamais il n’avait dit des paroles si sincères au court de sa vie. D’un côté il s’en voulait un peu de se dévoiler de la sorte mais d’un autre il se sentait si léger une fois se poids libéré. Il espérait simplement que Caïn ne le trouve pas trop fleur bleue et croirait en ce qu’il disait. Il serra légèrement ses mains dans les siennes un peu tremblantes.

Caïn avait laisser Eden glisser ses doigts entre les siens. Le brun avait collé son corps et avait dévoré ses lèvres avec une tendresse assassine qui le fit grogner. Et en séparant uniquement leurs lèvres, il plongea ses prunelles dans les siennes pour murmurer :

« Tu sais…Toute ma vie je n’ai aimé et adulé que moi-même…Je ne voyais pas plus loin que le bout de mon nez…Mais c’est diffèrent aujourd’hui, tu es apparu dans mon champ de vision et tout s’éclaire à présent…C’est toi…J’ignore aussi si c’est de l’amour pur, j’ignore le sens de ce mot autant que toi, mais si c’est ça alors je suis le plus comblé de tous en cet instant grâce à toi… »

A ces mots, il baissa les yeux, comme honteux d'avoir exposer sa faiblesse à la poigne puissante de Caïn. Mais ce qu'il avait dit résonnait à ses oreilles et un sourire aussi large que sincère. Il prit délicatement Eden dans ses bras, savourant la chaleur de son corps frêle contre le sien.

A travers sa poitrine, il sentait le coeur du brun battre la chamade. Délicatement, il posa une paume sur son torse, appréciant le soulèvement de sa chair sous la pulpe de ses doigts. La vie qui battait contre sa main était exquise. Il s'en délecta davantage en capturant tendrement les lèvres d'Eden, offrant sa langue à mille et une caresses.

Rompant cette étreinte calme et voluptueuse, Caïn attrapa le menton d'Eden, glissant ses doigts le long de sa gorge, effleurant sa clavicule et les artères palpitantes de son cou pour atteindre lentement la douceur de sa joue.

"On y va ?" demanda-t-il en plantant ses obsidienne dans les rubis flamboyant du brun.

Caïn n'attendit pas sa réponse et attrapa brusquement sa main, l'entrainant à sa suite en direction de la Harley, qui attendait sagement devant un arbre. Le blond retira l'antivol, offrit un casque à Eden, enfila le sien avant d'enjamber la moto, lançant sa jambe pour la faire démarrer dans un vrombissement violent, promesse d'une nuit érotique d'une grande intensité.

Il avait relevé les yeux juste à temps pour voir le sourire qui illuminait le visage de son amant, presque de son ange. Et quand ce dernier l’avait pris dans ses bras pour le serrer contre lui, il avait senti son cœur prêt à se décrocher de sa poitrine pour venir battre tout contre celui de Caïn.

Le blond posa doucement sa main contre le torse brulant du brun qui ferma les yeux pour savourer se contact puis il sentit ses lèvre se poser contre les sienne et sa langue quémander l’accès à sa bouche. Accès qu’Eden lui accorda immédiatement, ainsi commença un nouveau ballet de leurs langues entremêlées.

Eden sentit un léger vide lorsque Caïn rompit l’étreinte mais ce dernier le combla bien vite en touchant son menton, son cou et enfin sa joue si calmement et doucement que le brun se sentait fondre de désir et de bonheur.

« On y va… ? » Murmura le blond en l’embrassant du regard.

Se perdant dans l’immensité des yeux de Caïn, Eden eut à peine le temps de comprendre ce qu’il disait que ce dernier le tirait avec lui en dehors du bâtiment. Eden suivit. Dans cet état il l’aurait suivi jusqu’au bout du monde et au-delà si Caïn l’avait souhaité.

Il prit le casque que lui tendait le blond et l’enfila avant de monter derrière lui et de passer les bras autour de sa taille. Caïn démarra en trombe jusque son appartement. Plus rien n’avait vraiment d’importance en cet instant magique, Eden se sentait voler dans une parfaite plénitude qu’il n’arrivait pas vraiment à expliquer, il était juste bien et rien d’autre n’avait vraiment de sens. Il se demandait ce qu’il allait se passer ce soir, dans l’appartement de son blond. Il se voyait déjà nu dans le lit, son corps chaud collé à celui de Caïn et celui-ci en train de lui faire sauvagement l’amour.